Texte intégral enregistré par Albert Camus en 1954 suivi d'entretiens de l'INA.
En septembre 2002, Frémeaux & Associés et l’Ina (Institut national de l’audiovisuel), en accord avec Gallimard, ont mis pour la première fois à la disposition du public le texte intégral de "l’Etranger" d’Albert Camus. C’est à l’initiative de Michel Polac que nous présentons aujourd’hui la pièce maîtresse de l’œuvre théâtrale d’Albert Camus : Caligula, interprétée par son auteur.
Nous remercions la succession d’Albert Camus de nous avoir autorisé à reproduire un certain nombre d’interviews qu’Albert Camus avait donné à Jean Mogin le 13 septembre 1955, ainsi qu’une explication de Caligula enregistrée le 1er janvier 1958.
Patrick Frémeaux
En 1952, avant de monter dans son TNP “La Mort de Danton” de Büchner, Jean Vilar lut la pièce aux représentants des associations qui l’aidaient à remplir l’immense salle de Chaillot. Cette lecture a eu lieu au petit théâtre des Noctambules et je l’ai diffusée au “Club d’Essai de la RTF”. Ainsi est née mon émission “Lecture à une voix” qui a duré une dizaine d’années et qui a permis à des dizaines de comédiens et aussi quelques auteurs de découvrir les charmes et parfois les difficultés de ce genre d’exercice particulièrement risqué puisqu’il s’agissait d’une lecture publique donc dans les conditions du direct sans possibilités de corrections : cela donnait une tension dramatique au jeu de l’acteur, et l’encourageait car il sentait les réactions des spectateurs, tout particulièrement pour les pièces comiques.
C’est dans ces conditions que fut réalisée la “Lecture à une voix” de “Caligula” par son auteur Albert Camus, au cours de la saison 53-54 (bien que les fiches de la phonothèque indiquent 1955) aux Noctambules; à partir de 1955 ce fut au “Vieux Colombier” qui avait le double de places et une meilleure insonorisation que nous avons émigré. Aux Noctambules il me fallait la connivence du voisin du dessus, or justement, un jour il oublia de s’abstenir de tirer la chasse d’eau et je dus me pencher à l’oreille de Camus pour lui demander de s’interrompre en pleine action. J’ai longtemps conservé ce bobineau inoubliable !
C’est une chance pour nous que Frémeaux se soit attelé à la tâche d’exhumer de leurs tombeaux sonores de précieuses reliques enfouies dans les archives depuis cinquante ans.
Michel POLAC
Livret historique par Roger Grenier
Droits : Licence Frémeaux & Associés en accord avec l'Ina, Gallimard, Michel Polac, et Isabelle Camus.
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« Pièce remarquable » par Notes Bibliographiques
Lue ici par l’auteur en 1954, dans une version comportant quatre actes, Caligula est l’œuvre théâtrale la plus célèbre d’Albert Camus ; Souvent remaniée par l’auteur, elle s’inscrit, avec L’étranger et Le mythe de Sisyphe, dans sa réflexion sur le destin tragique de l’homme. Du jeune empereur romain dément et sanguinaire (dont le court règne fut relaté par Suétone), Camus se fait le chantre de l’Absurde. « Les homme meurent et ne sont pas heureux » dit Caligula après la mort de son amante sœur. Cette constatation le conduit à une liberté débridée qui le poussera à exécuter son entourage et à affronter crânement sa propre mort, comme acte ultime de celui qui a pris conscience et fait prendre conscience de l’absurdité de la vie. Pièce remarquable par son intensité dramatique, non dénuée de dérision, dont Camus, acteur dans sa jeunesse algéroise, est un merveilleux interprète. De courtes notations scéniques écrites et dites par l’auteur s’intègrent parfaitement aux dialogues et en rendent la compréhension lumineuse. Comme il a été judicieux d’exhumer un tel chef-d’œuvre !
NOTES BIBLIOGRAPHIQUES
"Caligula" Albert Camus par Epok
“Camus enregistra pour moi une Lecture à une voix de Caligula aux Noctambules. J’ai réécouté récemment le disque édité par Frémeaux et je trouve que, lue par l’auteur, la pièce tient drôlement le coup, avec son humour ravageur, cet humour dont les lecteurs de ses romans ne tenaient pas compte, se plaignait Camus, me rappelant que Kafka riait en lisant ses textes à ses amis.” Michel POLAC, EPOK
"Caligula" par Yves Michaud - France Culture
"La pièce la plus jouée de Camus." © FRANCE CULTURE
"La pièce la plus jouée de Camus. Une tragédie politique, sur la corruption du pouvoir absolu, mais aussi une tragédie privée, celle d'un homme que sa liberté entraîne vers le crime et la mort, et un drame métaphysique, celui de la condition humaine, telle que Camus la voyait à cette époque : absurde." Yves MICHAUD - © FRANCE CULTURE