« Une belle leçon d’histoire appliquée » par L’Enseignant
« Il y a les textes fondateurs de notre République. Et puis il y a ceux qui en font une grande démocratie, forcent notre fierté et inspirent le respect pour les auteurs. Parmi ceux-ci, figure bien entendu et sans conteste possible la bouleversante allocution de Robert Badinter à l’Assemblée nationale, en septembre 1981, alors qu’il présente aux parlementaires , pour cette fois au grand complet dans l’hémicycle, sont fameux réquisitoire pour l’abolition de la peine de mort. Les mots justes, éloquents et persuasifs, portés pas la conviction profonde de ce grand orateur, atteindront leur but puisque la même année, la peine capitale est abolie sur le territoire français. Une courageuse victoire d’un homme sur la barbarie, alors que l’opinion est majoritairement en faveur de cette peine. Une belle leçon d’histoire appliquée, mais aussi l’aboutissement du destin d’un humaniste exemplaire, dont la rigueur et l’honnêteté intellectuelle trouvent leurs illustrations au service des droits de l’humain. »
Par L’ENSEIGNANT
« Un document extrêmement intéressant » par Revue des Médiathèques et des Collections Musicales
« Un coffret de 4CDs vient illustrer, avec 30 ans de recul, le débat animé qui fut mené afin d’obtenir l’abolition de la peine de mort en France, en septembre 1981. Avec des allocutions de Robert Badinter, Philipe Séguin, Bernard Stasi, Gisèle Halimi, Gaston Flosse, Raymond Forni, etc… L’intégralité des débats s’est déroulée sur deux jours : les 17 et 18 septembre, cumulant plus de vingt heures et presque cent intervenants. Ce coffret offre une sélection représentative de la réalité des débats avec des partisans et des détracteurs. Des discours où l’investissement intellectuel et émotionnel des intervenants force le respect et impose une écoute attentive. Un document extrêmement intéressant, à présent que l’abolition de la peine de mort semble une évidence en France. Ce qui n’est pas le cas aux Etats-Unis, par exemple. »
Par Lucas Falchero — REVUE DES MEDIATHEQUES ET DES COLLECTIONS MUSICALES
« Frémeaux & Associés évoque une page majeure de l’histoire de la Ve République » par L’Alsace
« Editeur réputé du patrimoine sonore, Frémeaux & Associés évoque une page majeure de l’histoire de la Ve République avec l’abolition le 18 septembre 1981, de la peine de mort… Après plus de 25 heures de débat à l’Assemblée nationale et près de deux siècles de controverse, la loi, dans un texte d’une sobriété et d’une émotion exemplaires, était votée. Alors que 63% des Français en janvier 1981 sont pour le maintien de la peine de mort, le gouvernement Mitterrand par l’entremise de Robert Badinter, Garde des sceaux, entend bien faire aboutir une réforme emblématique… Pour entendre les voix de Badinter et des députés qui montèrent à la tribune de l’Hémicycle. Une page de notre mémoire collective. »
Par L’ALSACE
"Un document exceptionnel, qui mériterait une large audience" par Joël Jégouzo
Les éditions Frémeaux ont récemment publié, sous la forme d‘un coffret de 4 CDs, une sélection pertinente des 25 heures de débats qui animèrent l’Assemblée Nationale les 17 et 18 septembre 1981. Un document exceptionnel, qui mériterait une large audience –dans nos lycées par exemple, surtout à l’heure où l’on songe à supprimer l’éducation civique des programmes scolaires- et une relecture critique, trente ans plus tard.
Un débat précieux, instruit, digne, mettant un terme à deux siècles de controverse. Deux siècles d’une controverse qui aurait pu cependant durer longtemps encore, tant les mentalités n’y étaient pas prêtes. Car en 1981, la question de la peine de mort restait ouverte dans la société française. En janvier de la même année, un sondage d’opinion ne révélait-il pas que 63% des français étaient opposés à son abolition ? Deux siècles de controverses que les médias voyaient en outre tarir sans plaisir, tant la rareté des exécutions de la dernière décennie avait nourri leurs tirages. Des médias toujours enclins à jouer des peurs de l’opinion publique, et lui servir un discours sécuritaire propre à l’enfermer dans ses émotions les plus viles. Mais pour une fois, la représentation politique sut s’élever au-dessus des querelles partisanes ou des chicanes politiciennes (magnifique allocution de Philippe Seguin), pour élever sa parole à cette dimension du sens qui fait la dignité de l’humain. Car dans cette valse hésitation qui menaçait et travaillait sourdement l’équilibre de la société française, entre responsabilité et libertés individuelles, entre violence et sécurité, nos députés surent choisir une issue verticale.
Il vaut la peine de réécouter ces débats, les allocutions des uns et des autres, de la majorité de l’époque comme de son opposition, pour comprendre à quelle hauteur la représentation nationale sut s’élever. Historique ce débat, le mot n’est pas de trop, au cours duquel les représentants du Peuple français surent engager leur responsabilité devant l’Espèce humaine –et c’est à dessein, quand on évoque la justice d’élimination qui était celle de nos deux siècles précédents, selon l’effroyable mais puissante formule de Robert Badinter, que l’expression est employée ici, en référence au très beau livre de Robert Antelme.
Il faut réécouter Robert Badinter s’élevant contre, formule encore une fois ô combien forte et terrifiante, cette justice d’élimination dans laquelle pataugeait encore le système judiciaire français. Dans quelle logique de l’Histoire une Nation s’inscrit-elle quand elle prône pareille justice d’élimination ? Il y eut tout d’un coup comme une vraie prise de conscience dans l’hémicycle, en particulier du sens moral que tout engagement politique doit prendre.
Aussi odieux que soit l’acte, martelait Badinter, il n’est pas d’être humain dont il faille désespérer totalement. Et il semblait bien n’être plus permis, dans cette France de l’aube mitterrandienne, de désespérer des hommes.
Une aube. Pas un monde nouveau cependant, car l’on n’a guère poussé, depuis, et même sous la législature socialiste, cette réflexion morale quant à la réalité du système judiciaire français – ces mêmes députés ne devront-ils pas, presque trente ans plus tard justement, plancher de nouveau sur les failles de notre système judiciaire avec l’Affaire d’Outreau et se porter de nouveau à ces hauteurs qu’on aimerait ne pas leur voir quitter ? Car si assumer une justice d’espérance, en 1981, s’entendait d’un renoncement à la peine de mort, nul n’est venu nous dessiner depuis les contours de cette justice d’espérance dans les prisons françaises.
Un débat à poursuivre donc, sinon à reprendre, à l’époque où les discours sécuritaires enferment les français dans des conjurations d’angoisse et de peur, en une époque où les passions négatives sont bien près de triompher de notre humanité.
Un discours à reprendre exactement dans les mêmes termes que ces interrogations inquiètes qui se firent jour lors du débat sur la peine de mort, et dont Robert Badinter se fit l’écho, quand il rappela que l’une des raisons pour laquelle la peine de mort avait fini par introduire un profond malaise au sein de la hiérarchie judiciaire, l’une des raisons pour lesquelles elle était devenue insupportable aux yeux des magistrats de cette hiérarchie, leur fut révélée quand ils réalisèrent la parenté de la situation française avec l’orientation que tout cela prenait aux Etats-Unis, quand, en 1972, la Cour Suprême avait elle-même songé à abolir la peine de mort, d’avoir soudain découvert que 60% des condamnés à mort étaient noirs, alors que la population noire ne représentait que 12% de la population totale du pays…
Et Badinter d’enfoncer le clou, à nous donner rétrospectivement la nausée, en énonçant que dans cette France des années 65 à 81, près de la moitié des exécutés avaient été des français d’origine maghrébine… Le tout énoncé avec beaucoup de confusion, le Ministre s’embrouillant sur le statut de ces exécutés, incapable de nous dire précisément s’ils étaient vraiment étrangers ou français d’origine étrangère, pour les réunir finalement sous le vocable pudique de «maghrébins», comme pour mieux témoigner du racisme secret qui campait alors déjà solidement en France. Honteuse application, découvrions-nous : sur les 12 000 crimes de sang commis dans la même période, les tribunaux français avaient choisi de ne livrer au bourreau et à la vindicte que des coupables préférentiellement maghrébins… L’un des racismes les plus manifestes et cependant le mieux dissimulé, sinon protégé, dans cette France sécuritaire qui bientôt fourbirait ses débats obscènes…"
par Joël JEGOUZO
« Un tournant de l’Histoire. » par Enseignement Catholique
« Dix-sept septembre 1981 : « « La parole est à monsieur le garde des Sceaux, ministre de la Justice. » l’hémicycle retient son souffle. Les yeux rivés sur la tribune, Robert Badinter s’avance. A la main, les notes de son discours […]. Ce sera sa dernière plaidoirie. La dernière longue série commencée en 1972. » Le 18 septembre 1981, par 363 voix contre 117, l’Assemblée nationale adopte, après deux jours de débats, le projet de loi sur l’abolition de la peine de mort. Douze jours plus tard, le texte est voté par le Sénat par 160 vois contre 126. Il aura fallu plus de 25 heures de débat, 100 intervenants et près de deux siècles de controverse. Près de 30 ans plus tard, un coffret audio aide à comprendre le cheminement qu’il a été nécessaire d’accomplir en France pour parvenir à cette évidence que nul homme ni Etat n’a le droit de condamner à mort un être humain. Les CDs ne représentent pas l’intégralité des débats – seule l’allocution de Robert Badinter est restituée dans son intégralité - ; ils proposent une sélection effectuée par Lola Caul-Futy Frémeaux dans le respect de l’équilibre entre partisans et détracteurs de ce projet de loi gouvernemental. Les passions se rencontrent ici, en ces deux jours de septembre 1981 qui marquèrent un tournant de l’Histoire. »
Par EDC — ENSEIGNEMENT CATHOLIQUE
"When France repealed the death penalty" by The Arty Semite
"Few CD companies might be expected to issue a four disc set of 30-year-old political speeches, but this is just what the enterprising small label Frémeaux & Associés has done with Robert Badinter’s 1981 French National Assembly oratory. Badinter, who appeared in the 2007 documentary “Being Jewish in France,” was Justice Minister in 1981, when France repealed the death penalty. His eloquent oratory was no small part of the momentous outcome. Seconded by the brilliant French lawyer and activist Gisèle Halimi, of Tunisian Jewish origin, Badinter fervently pointed out that judicial errors are made, and innocent prisoners put to death. Recently, Badinter came forward with detailed personal reminiscences of his wartime experiences in “Trials of Justice,” a biography from Les éditions du Toucan by historian and sociologist Pauline Dreyfus.
(...) Torrès, who affectionately called Badinter “my studious little rabbi,” was firmly opposed to the death penalty, and doubtless influenced his brilliant pupil. In addition to his legal and political career, Badinter has authored two illuminating histories, “Free and Equal: Emancipation of the Jews (1789-1791)” and “Ordinary antisemitism: Vichy and Jewish Lawyers (1940-1944),” both from Fayard. Also a defender of gay rights, Badinter wrote a play defending Oscar Wilde, published in 1995 by Actes Sud éditions."
by Benjamin IVRY - THE ARTY SEMITE
"L’homme ne tremble pas. Refuse les effets de manche. Les mots suffiront." par Abolition.fr
"17 septembre 1981. « La parole est à Monsieur le garde des Sceaux, ministre de la justice. » L’hémicycle retient son souffle. Les yeux rivés sur la tribune, Robert Badinter s’avance. A la main, les notes de son discours. L’homme ne tremble pas. Refuse les effets de manche. Les mots suffiront. Il en a l’intime conviction. Ce sera sa dernière plaidoirie. La dernière d’une longue série commencée en 1972. Retour en arrière.
Dans le froid et le brouillard de ce mois de novembre, le verdict est tombé, implacable et réclamé par l’opinion publique : la mort pour Buffet et Bontems. La mort pour les preneurs d’otages, pour les assassins. La foule exulte. Pour Robert Badinter, l’un de leurs avocats, c’est la consternation. Comment peut-on se réjouir de la mort de ses semblables ?
A 44 ans, ce fils d’immigrés russes vient de trouver sa cause. Il se plonge dans les rapports sur la peine de mort, et milite dans des associations, participe à des congrès. Très vite, il devient une voix. Le porte-parole du mouvement abolitionniste. L’avocat est charismatique, passe bien à la télévision, enchaîne les passages radio. Mais il ne convainc pas. Ni les politiques, ni l’opinion publique ne sont prêts à entendre son credo : distinguer justice et loi du talion. Indifférence totale. Plus de 65 % des Français continuent de croire la peine de mort indispensable.
En 1976, alors que Christian Ranucci vient d’être guillotiné pour le meurtre d’une fillette dont il se disait innocent, Robert Badinter entend parler de Patrick Henry. Ce jeune homme de 22 ans a enlevé et tué un gamin, Philippe Bertrand. Il accepte l’affaire. La France, elle, est sous le choc. « Elle a peur », lâche Roger Gicquel, le présentateur du journal télévisé. Des familles entières vibrent à la douleur des parents du petit Philippe. On réclame une justice exemplaire. La mort, bien sûr. Il n’y a qu’elle qui peut réparer le meurtre d’un enfant. Robert Badinter est convaincu du contraire. Il le dit et le redit. Dans la rue, devant les médias, aux familles des victimes : la mort ne soigne pas, ne libère pas. L’affaire le hante. Ce procès ne sera pas celui d’un paumé, d’un irresponsable, mais celui de la peine de mort. Une première en France. A la barre, il convoque des experts en criminologie. Tous sont formels : « La peine de mort ne dissuade pas les criminels. » Plus tard, l’abbé Clavier, aumônier de la prison de la Santé, explique qu’« on ne répond pas à l’horreur par l’horreur. Il faut savoir pardonner. » Puis vient l’instant de l’ultime plaidoyer. Robert Badinter cherche le regard des jurés, les fixe un à un et déclare : « Si vous votez la mort, vous resterez seuls avec votre verdict, pour toujours. Et vos enfants sauront que vous avez condamné un jour un jeune homme, et vous verrez leur regard.» Il a touché juste. La sentence tombe : réclusion à perpétuité. Désormais rien ne sera plus jamais comme avant. Dans l’histoire de l’abolition la sentence est décisive. Pour le crime le plus abominable qui soit, des hommes et des femmes, des jurés ont pu comprendre, gracier. Ils ont donné sa chance au pire des criminels. Et accepté que Patrick Henry puisse changer. Mais Badinter, lui, est obligé de filer à l’anglaise du tribunal. Le temps que l’affaire se tasse, ses deux enfants quittent Paris. Lui reste. Pendant des mois, il reçoit des lettres de mort et d’insultes. Mais il ne renonce pas. Plus entêté que jamais, il court les cabinets politiques, les ministères, multiplie les interviews. Il ne faut pas baisser les bras. Pas maintenant. Alors il accepte les affaires et continue de défendre des condamnés à mort. Sans relâche. La rage au ventre. L’opinion publique campe, elle, sur ses positions. En 1979, un journal du Sud-Est affirme que 75 % de ses lecteurs seraient favorables au maintien de la peine de mort. En 1981, guère mieux : 63 %. Mais cette fois-ci, il y a de l’espoir. François Mitterrand, candidat aux présidentielles, vient de déclarer : « Dans ma conscience, dans la foi de ma conscience, je suis contre la peine de mort ». La gauche remporte les élections. En acceptant le poste de Ministre de la justice, Robert Badinter, devenu le symbole du mouvement abolitionniste en France, sait que sa longue marche touche à sa fin. En ce 17 septembre 1981, il prononce enfin cette phrase tant attendue: « Monsieur le président, Mesdames, Messieurs les députés, j’ai l’honneur de demander à l’Assemblée Nationale l’abolition de la peine de mort en France. »"
Christelle PANGRAZZI © ABOLITION.FR