« Dépasser la guitare pour revenir à la musicalité » Richard Manetti dans Jazzmagazine Jazzman
EXTRAIT DE L'ENTRETIEN RÉALISÉ PAR FRANCK BERGEROT DANS JAZZMAGAZINE JAZZMAN (Numéro 651 / Juillet 2013)
« Richard Manetti : [...] Notre génération apporte quelque chose de nouveau qui manquait au renouveau manouche, mais qu’avait déjà Django : des phrases longues, construites, bien placées sur l’harmonie, personnelles. Mais nous avons encore à nous défaire du goût de la vitesse et de la brillance, nous concentrer sur le placement et la jolie note, dépasser la guitare pour revenir à la musicalité. C’est la principale leçon que nous avons apprise de Romane.
Pierre Manetti : Moi aussi, j’ai aimé les plans, la rapidité. Ça m’a permis d’évoluer, incité à relever des phrases. Mais en écoutant Pat Metheny ou Stevie Wonder, qui sont compositeurs, on comprend qu’il faut transcender l’instrument.
Romane : Dans notre trio, on n’a jamais l’impression qu’il y a trois guitares, ni qu’il manque une basse et une batterie. Ça sonne comme un orchestre de jazz. On a travaillé cet espace. Il n’y a jamais deux guitares rythmiques : l’un fait les basses, l’autre la rythmique (avec des arrangements originaux, pas la pompe manouche), le dernier improvise. Puis on interchange les rôles. La seule règle : que ça groove !
Richard : À trois guitares électriques, on risquait de se marcher dessus. Il fallait répartir les rôles. Je joue souvent la walking bass ou des accords par-dessus la rythmique, comme la main gauche d’un pianiste. Sur Moanin’ de Bobby Timmons et sur Tee Town de Jaco Pastorius, j’utilise un octaver.
Cette “Guitar Family Connection”, c’est la suite logique du duo “Père et fils de Romane et Richard ?
Pierre : Ça devait arriver. Lorsque que Richard vient chez Romane à Samois où je vis encore, si l’on ne joue pas à la pétanque, on jamme au salon et c’est du tonnerre.
Richard : C’est un vieux projet auquel je me suis longtemps refusé. Lorsque “Père et Fils” est sorti, je suis devenu “le fils de Romane”. Alors j’ai tout de suite fait “Why Note” pour me démarquer. Pierre a aujourd’hui l’âge que j’avais lorsque l’on a fait “Père & Fils”. C’était son tour d’avoir le pied à l’étrier. Lorsque l’on joue ensemble, on s’entend si bien. Mais il ne s’agit pas d’une jam. On a fait répéter Papa comme jamais il n’avait répété. On ne voulait faire que des compositions originales…
Romane : Mais pendant ces répétitions m’est venue l’envie de faire ce que je n’avais jamais fait : enregistrer les standards. Jusque là, je ne me sentais pas à la hauteur. Mais aujourd’hui, probablement, grâce à mes deux fistons, je suis prêt. »
Par Franck BERGEROT - JAZZMAGAZINE JAZZMAN
« Friday night in Samois-sur-Seine ! » par Benjamin Goldenstein
« Voici un disque dont j’aurais adoré, même de loin, même de peu, pouvoir penser faire partie de l’aventure. Dès la première écoute, c’est la liberté de ton qui me frappe : la pulsation rythmique sur le 2ème et le 4ème temps, ce jeu qui tient du swing, qui bise le bop, qui touche le funk. Et si jamais il n’y avait pas d’univers Over the Rainbow, qu’à cela ne tienne : il y en a un merveilleux dans ce disque ! Pierre Manetti prend le A train en première classe et passe son troisième dan de Navigo sur son énorme chorus d’après break… Richard signe un « Italian Prelude » de grande classe, qu’on imagine tout à fait en bande-son d’un film du Cinecittà de la grande époque ! Enregistrer des disques, dans la vie d’un musicien comme Romane qui en a près de 20 à son nom, ça doit finir par devenir une sorte de routine, une habitude de vieux garçon en somme… Mais ce disque, avec ses fils, ce partage d’une même passion exprimée avec autant de personnalité par chacun de ces hommes qui se doivent tant, c’est quelque chose d’unique dans la vie d’un musicien, dans la vie d’un homme. Autour de minuit, quand Red Naomie se met à Moanin’, lassée d’attendre que son prince arrive un jour, pas besoin d’aller à San Francisco : Friday Night, c’est à Samois-sur-Seine ! »
Par Benjamin GOLDENSTEIN (Directeur artistique Frémeaux & Associés 2005-2012)
« Standards et originaux furent arrangés méticuleusement » par Jazz Mag-Jazzman
Loin d’être le résultat d’une jam-session familiale réunissant Romane, figure majeure du jazz manouche, et ses deux fils, « Guitar Family connection » a été mûrement pensé, préparé, peaufiné. Standards et originaux furent arrangés méticuleusement. On porta également grande attention au son de l’orchestre. Car il s’agit bien d’un orchestre. Chaque instrumentiste investit tour à tour diverses fonctions (ligne de basse, accompagnement, solo). Par souci de cohérence, pour faciliter permutations et interactions, les trois instruments sont réglés de façon à obtenir des sonorités très proches. C’est peut-être ce qui amena le publicitaire de service à parler « d’un musicien à six bras » alors qu’au contraire la similitude des sons invite à aller au-delà de l’immédiat, du spectaculaire, à prendre le temps de s’intéresser à tous les éléments du discours et donc à découvrir trois musiciens aux identités bien distinctes. Amusez-vous par exemple à étudier la place de la composante manouche dans leurs jeux. Pour Romane, évidemment, elle est la base même du style. Chez Richard, qui a une culture guitaristique très large (cf. « Why Note », Label bleu, 2013, pour sa facette la plus « moderne »), on repère facilement des phrasés ou des ponctuations venant tout droit du jazz manouche, mais c’est une composante parmi d’autres. Quant à Pierre, le plus américain des trois, sa prestation m’a rappelé son intervention à la fin du documentaire consacré à Richard sur le second Selmer 607 : « La première phrase que j’ai apprise, c’est une phrase de George Benson ». On le croit volontiers. Guy CHAUVIER – JAZZ MAG/JAZZMAN
« Virtuose » par Jazz News
Dans la famille virtuose, demandons les Manetti père et fils qui, de Romane à Richard, jeune homme célébré par divers prix, en passant par Pierre, cadet riche de fiévreuses promesses, branchent l’électricité pour une session autour d’une poignée de standards (un pointilliste « Take The A Train ») et autant de compositions perso. Cette nouvelle génération de guitaristes rappelle la beauté de leur approche de la musique, mêlant l’ambre gitane et le noir de la funky music. Lorsque dans sa composition « Two Destiny » Romane s’envole tel un oiseau mutin, Pierre n’est pas loin de le suivre dans ses pyrotechnies. Et le rêveur « Italian Prelude » (signé Richard) fera tressaillir les cœurs les plus endurcis. Christian LARREDE – JAZZ NEWS
« Un album de guitare jazz gorgé de swing et de sensibilité » par 7Hebdo
« L’esprit de famille souffle aussi sur le Guitar Family Connection où le guitariste Romane croise ses chorus avec ceux de ses fils, eux aussi adeptes de la six-cordes, Richard et Pierre Manetti. Ensemble, ils donnent de ferventes versions de standards comme Someday my prince will come, Over the rainbow, Round midnight, ou trouvent des angles nouveaux sur Take the A train ou Moanin’, écartant ainsi tout risque de monotonie. Oublions l’étiquette "manouche" : il s’agit là d’un bel album de guitare jazz, gorgé de swing et de sensibilité. »
Par Richard SOURGNES – 7 HEBDO
« Une tribu bénie » par Le Temps
« Sûr que les réunions de famille chez les Manetti (papa Romane et ses très doués-dévoués fistons Richard et Pierre) se passent à autre chose qu’à égrener les souvenirs d’enfance ou à s’apitoyer sur le temps qui fuit. Mais attention à ne pas surinterpréter: un disque qui se la joue (c’est son titre) Guitar Family Connection, qui s’ouvre sur «Over The Rainbow», chanson-tube du Magicien d’Oz et donc référence au film familial par excellence, pourrait facilement virer au coup médiatique. Pas de chantage au sentiment ici, juste l’évidence d’une cellule familiale aux idéaux exceptionnellement convergents, qui pense, rêve, parle musique et rien que ça, du début à la fin d’un disque où cette tribu bénie n’oublie surtout pas de prendre des risques. Parce que si ces gadjé avérés, notoirement Non-Manouches, connaissent leur Django sur le bout des cordes, c’est surtout, du génial Gitan, la leçon de liberté (ou d’insoumission, c’est selon) qu’ils ont retenue. Elle se décline de toutes les façons: anachronisme (qui pour inscrire à son répertoire, en 2013, «Secret Love» ou «My Romance»?), intrusion chez les autres (Jaco Pastorius, dont le «Teen Town» est bien aux antipodes de l’esprit manouche), provocation douce (tempo inhabituellement rapide de «Someday My Prince Will Come», ou des déjà nommés «Secret Love» et «My Romance», ou encore d’un «Take the A Train» assorti d’un arrangement… ferroviaire du meilleur goût). On n’oublie pas la poésie toute pure d’un «Round Midnight» où, rivalisant de discrétion (si l’on peut dire), les trois guitaristes retiennent leur souffle, et nous, nos larmes. »
Par Michel BARBEY – LE TEMPS
« Romane imprime sa French touch immédiatement reconnaissable » Par Django Station
« En 2007, Romane avait enregistré « père et fils » en duo avec Richard, son fils ainé ; avec l’arrivée de Pierre, le petit dernier, la Guitar Family Connection est au complet. L’exercice à 3 guitares, sans basse ni batterie n’est jamais évident, mais le trio a beaucoup répété et ça s’entend : mise en place, arrangements ; il n’y a par exemple jamais deux guitares rythmiques ; l’un fait les basses, l’autre la rythmique et le troisième improvise, et tout cela à tour de rôle ; avec ce dispositif, le trio sonne comme un orchestre. Trois guitares donc, deux électriques, plus la Dupont de Romane, modèle spécial équipé de deux stimer. N’étant jamais là où on l’attend, Romane se confronte ici à quelques grands standards, ce qu’il n’avait quasiment jamais fait, sur disque en tous cas. Complètement chez lui sur Over the rainbow, Take the A train et autre Round midnight Romane leur imprime sa French touch immédiatement reconnaissable : très beau son et toucher de guitare, phrasé précis et chantant, fraicheur et sens de la construction du chorus (cf son solo aérien sur Someday my prince will come). Si Romane se détache du trio, les fistons ne sont pas en reste. Souvent tentés, de par leur jeunesse, par le spectaculaire, les deux jeunes guitaristes ont compris qu’il fallait se défaire de la vitesse, dépasser la guitare pour revenir à la musique. Moins marqués par la gypsy touch, Richard et Pierre louchent vers la guitare jazz tendance Scofield, Metheny ou Benson (cf l’ambiance très groovy de Moanin’) et une esthétique plus fusion (cf la reprise de Teen town de Pastorius). Si Richard manifeste parfois quelque impatience dans ses chorus, au détriment de l’articulation de son phrasé, ses fusées font mouche (cf son remarquable solo sur Round’midnight ou le très chantant Italian prelude de sa composition sur lequel il s’envole). Le phrasé plus posé de Pierre, au beau son rond, n’exclut pas quelques accélérations nerveuses (cf sur le convaincant Red Naomi de sa composition). Rien de neuf sous le soleil me direz-vous, ce répertoire ayant été maintes et maintes fois joués depuis 50 ans et plus par de grands guitaristes (entre autres le trio Charlie Byrd, Herb Ellis, Barney Kessell) ; mais si le jazz, tout comme le rock d’ailleurs, est devenu une musique de répertoire, cette Guitar Family Connection n’a pas à rougir de ses glorieux ainés. De la belle guitare jazz. »
Par Francis COUVREUX – DJANGO STATION
« Un album de guitare jazz gorgé de swing et de sensibilité » par 7Hebdo
« L’esprit de famille souffle aussi sur le Guitar Family Connection où le guitariste Romane croise ses chorus avec ceux de ses fils, eux aussi adeptes de la six-cordes, Richard et Pierre Manetti. Ensemble, ils donnent de ferventes versions de standards comme Someday my prince will come, Over the rainbow, Round midnight, ou trouvent des angles nouveaux sur Take the A train ou Moanin’, écartant ainsi tout risque de monotonie. Oublions l’étiquette "manouche" : il s’agit là d’un bel album de guitare jazz, gorgé de swing et de sensibilité. »
Par Richard SOURGNES – 7 HEBDO
« Une tribu bénie » par Le Temps
« Sûr que les réunions de famille chez les Manetti (papa Romane et ses très doués-dévoués fistons Richard et Pierre) se passent à autre chose qu’à égrener les souvenirs d’enfance ou à s’apitoyer sur le temps qui fuit. Mais attention à ne pas surinterpréter: un disque qui se la joue (c’est son titre) Guitar Family Connection, qui s’ouvre sur «Over The Rainbow», chanson-tube du Magicien d’Oz et donc référence au film familial par excellence, pourrait facilement virer au coup médiatique. Pas de chantage au sentiment ici, juste l’évidence d’une cellule familiale aux idéaux exceptionnellement convergents, qui pense, rêve, parle musique et rien que ça, du début à la fin d’un disque où cette tribu bénie n’oublie surtout pas de prendre des risques. Parce que si ces gadjé avérés, notoirement Non-Manouches, connaissent leur Django sur le bout des cordes, c’est surtout, du génial Gitan, la leçon de liberté (ou d’insoumission, c’est selon) qu’ils ont retenue. Elle se décline de toutes les façons: anachronisme (qui pour inscrire à son répertoire, en 2013, «Secret Love» ou «My Romance»?), intrusion chez les autres (Jaco Pastorius, dont le «Teen Town» est bien aux antipodes de l’esprit manouche), provocation douce (tempo inhabituellement rapide de «Someday My Prince Will Come», ou des déjà nommés «Secret Love» et «My Romance», ou encore d’un «Take the A Train» assorti d’un arrangement… ferroviaire du meilleur goût). On n’oublie pas la poésie toute pure d’un «Round Midnight» où, rivalisant de discrétion (si l’on peut dire), les trois guitaristes retiennent leur souffle, et nous, nos larmes. »
Par Michel BARBEY – LE TEMPS
« Romane imprime sa French touch immédiatement reconnaissable » Par Django Station
« En 2007, Romane avait enregistré « père et fils » en duo avec Richard, son fils ainé ; avec l’arrivée de Pierre, le petit dernier, la Guitar Family Connection est au complet. L’exercice à 3 guitares, sans basse ni batterie n’est jamais évident, mais le trio a beaucoup répété et ça s’entend : mise en place, arrangements ; il n’y a par exemple jamais deux guitares rythmiques ; l’un fait les basses, l’autre la rythmique et le troisième improvise, et tout cela à tour de rôle ; avec ce dispositif, le trio sonne comme un orchestre. Trois guitares donc, deux électriques, plus la Dupont de Romane, modèle spécial équipé de deux stimer. N’étant jamais là où on l’attend, Romane se confronte ici à quelques grands standards, ce qu’il n’avait quasiment jamais fait, sur disque en tous cas. Complètement chez lui sur Over the rainbow, Take the A train et autre Round midnight Romane leur imprime sa French touch immédiatement reconnaissable : très beau son et toucher de guitare, phrasé précis et chantant, fraicheur et sens de la construction du chorus (cf son solo aérien sur Someday my prince will come). Si Romane se détache du trio, les fistons ne sont pas en reste. Souvent tentés, de par leur jeunesse, par le spectaculaire, les deux jeunes guitaristes ont compris qu’il fallait se défaire de la vitesse, dépasser la guitare pour revenir à la musique. Moins marqués par la gypsy touch, Richard et Pierre louchent vers la guitare jazz tendance Scofield, Metheny ou Benson (cf l’ambiance très groovy de Moanin’) et une esthétique plus fusion (cf la reprise de Teen town de Pastorius). Si Richard manifeste parfois quelque impatience dans ses chorus, au détriment de l’articulation de son phrasé, ses fusées font mouche (cf son remarquable solo sur Round’midnight ou le très chantant Italian prelude de sa composition sur lequel il s’envole). Le phrasé plus posé de Pierre, au beau son rond, n’exclut pas quelques accélérations nerveuses (cf sur le convaincant Red Naomi de sa composition). Rien de neuf sous le soleil me direz-vous, ce répertoire ayant été maintes et maintes fois joués depuis 50 ans et plus par de grands guitaristes (entre autres le trio Charlie Byrd, Herb Ellis, Barney Kessell) ; mais si le jazz, tout comme le rock d’ailleurs, est devenu une musique de répertoire, cette Guitar Family Connection n’a pas à rougir de ses glorieux ainés. De la belle guitare jazz. »
Par Francis COUVREUX – DJANGO STATION
« Ca joue terrible » par Le Monde
« Si l’on veut se faire une idée du programme de luxe du Festival Django Reinhardt, 36e édition (de Bratsch à Marcus Miller, en passant par Niño Josele & Chano Dominguez, Indra Rios Moore, J.J. Milteau, ou Electro Deluxe), on s’en tiendra à la première soirée. Ouverture en fanfare à trois guitares : Guitar Family Connection, soit Romane et ses deux élégants fils, les frères Manetti. Ailleurs, ce serait une soirée en soi. Non seulement « ça joue terrible », comme disent les jeunes musicos, mais ils jouent en sourire, sans se prendre le chou, pour le plaisir. Le pire, c’est que l’exercice a l’air des plus faciles : or, cette musique, si facile à jouer mal, exige autant de science que la théorie de la relativité restreinte. Plus le rythme. En dandys accomplis, conscients par définition de leur double jeu, les manouches jouent en se jouant, et se jouent de nous sans jamais nous mentir. Habillage marrant, pour finir, de Take the A Train – composition de Billy Strayhorn que l’on attribue à son alter ego, Duke Ellington. On ne prête qu’aux riches. »
Par Francis MARMANDE – LE MONDE